BRUXISME ET TOXINE BOTULIQUE

Le bruxisme

Le bruxisme est un phénomène de contractions involontaires répétitives des muscles masticateurs sans objectif alimentaire. Il peut se soigner en injectant une toxine botulique. Ces contractions peuvent occasionner différents mouvements des mâchoires l’une par rapport à l’autre tels que :
– des serrements
– des grincements
– des mouvements toniques
– des mouvements d’avancée/recul de la mâchoire du bas

Ces mouvements peuvent être diurnes et/ou nocturnes et d’intensité variable. Le bruxisme est présent chez 20% de la population adulte avec une prédominance féminine. Aucune cause manifeste n’a pu être retrouvé. En revanche le bruxisme a été associé à plusieurs facteurs : nervosité, personnalité anxieuse, tabagisme, et consommation de café et d’alcool.

Conséquences dentaires

Les contraintes exercées sur les dents par le bruxisme conduisent à plusieurs types de lésions dentaires :

abrasions dentaires

llustration 1: abrasions dentaires avec perte de hauteur majeure de l’arcade dentaire supérieure

Les abrasions (illustration 1) qui sont prépondérantes en cas de grincements. Il s’agit de l’usure de l’émail de la face occlusale des dents. Les dents s’usent et diminuent de hauteur.

 

 

 

Illustration 2: abfractions de l’hémiarcade supérieure droite (secteur 1)

Les abfractions (illustration 2) sont elles, plus fréquentes chez les patients ayant un bruxisme statique : serrement de dents sans grincement. Elles correspondent à une perte de substance dentaire au niveau du collet dentaire. La physiopathologie des abfractions fait état d’une déminéralisation de la dentine vestibulaire liée à des micro fractures consécutives aux contraintes en compression sur les dents.

 

 

Toute lésion de l’émail faisant apparaître la dentine expose cette même dentine au risque carieux (la dentine étant moins dure et moins résistante que l’émail aux attaques bactériennes conduisant aux caries). Outre les lésions dentaires, les contraintes mécaniques du bruxisme mènent à des destructions prothétiques : perte d’amalgame, descellement de couronne prothétique…

Il faut parfois savoir évoquer le bruxisme chez les patients ayant régulièrement des problèmes de molaires et dans une moindre mesure des problèmes de prémolaire (perte d’amalgames, descellement de couronne…).

Par ailleurs, les contraintes sur les arcades dentaires peuvent créer des douleurs mimant des atteintes organiques dentaires faisant rechercher sans succès caries et autres atteintes infectieuses.

Conséquences musculaires

Le bruxisme résulte de la contraction de différents muscles. Les plus utilisés sont : les muscles masséters, temporaux et ptérygoïdiens médiaux. Dans une moindre mesure les ptérygoïdiens latéraux sont aussi sollicités.
Les muscles deviennent douloureux et tendus. Les patients présentent des douleurs musculaires temporales parfois confondues avec des migraines temporales. Des douleurs et une sensation de raideur massétérine sont aussi régulièrement constatés chez les patients bruxomanes.

muscle masseter et muscle temporal

Muscle masseter et muscle temporal

Ces symptômes perturbent les fonctions normales de mastication et de parole. Du fait de ces sollicitations intenses, les muscles s’hypertrophient donnant un résultat de mâchoire carrée pouvant être disgracieux.

Conséquences articulaires

L’articulation temporo-mandibulaire (ATM) uni la mandibule au crane. Elle assure les mouvements de la mâchoire du bas par rapport à la mâchoire du haut.

articulation temporo-man-dibulaire, localisation et coupe

Articulation temporo-man-dibulaire, localisation et coupe

Les conséquences du bruxisme sur l’ATM sont multiples, elles sont d’autant plus préjudiciables à la vie quotidienne du patient qu’il s’agit d’une des articulation les plus utilisé du corps humain.

L’atteinte organique précoce de l’ATM débute la plupart du temps par une rupture du frein postérieur. Ceci conduit à un déplacement en avant du disque articulaire, il se retrouve alors en position pathologique ce qui provoque des craquements au niveau de l’articulation éventuellement associé à une limitation de l’ouverture buccale.

Puis le disque se fragmente et peut être expulsé en avant de l’articulation mettant en contact les surface cartilagineuses du condyle mandibulaire et de la glène temporale. Les surfaces articulaires cartilagineuses étant très fine elles en viennent à s’user ce qui conduit à une arthrose de l’ATM.

Des douleurs ou dysfonctionnements de cette articulation auront donc nécessairement une impact fonctionnel :
– limitation de l’ouverture buccale,
– difficultés et douleurs à la mastication d’aliments durs,
– trouble de la parole lors des atteintes sévère.

Le bruxisme peut être parfaitement inconscient et seules ses conséquences peuvent être symptomatiques.

Diagnostic du bruxisme

Le diagnostic actuelle du bruxisme repose le plus souvent sur des éléments indirects à savoir la mise en évidence des conséquences du bruxisme. Il s’agit donc de faisceaux d’arguments qui associés vont conduire à la suspicion du bruxisme et en aucun cas une preuve directe pouvant affirmer et explorer le bruxisme de manière qualitative et quantitative. Ces argument sont : douleurs musculaire et articulaires avec troubles fonctionnels, lésions dentaires abrasions, abfractions, éléments prothétiques dentaires régulièrement abîmés ou descellement de couronnes prothétiques.

Traitement et prise en charge du bruxisme

L’idéal pour traiter une pathologie est d’en supprimer la cause. Ceci dit du fait de la nature très psychologique et chronique de la cause il est très difficile de supprimer le facteur psychologique causal du bruxisme.

il est toutefois possible dans certains cas de réduire notablement le facteur stress chez certains patients en leur proposant des méthodes de type sport, méditation sophrologie. Ceci peut chez certains nettement diminuer les douleurs due au bruxisme.

La kinésithérapie peut diminuer les douleurs musculaires et articulaires. La rééducation permet de reconditionner le patient à ne pas bruxer la journée. Ceci dit elle ne permet pas de réduire le bruxisme nocturne.

les traitements médicamenteux sont pour la plupart symptomatiques. Ils sont efficaces sur les douleurs au stade précoce des atteintes musculo-articulaires. Cependant ils ne réduisent pas les contractions musculaire, ils s’agit d’antalgiques, d’anti-inflammatoires et de myorelaxants.

La toxine botulique

Le traitement le plus efficace du bruxisme repose sur la paralysie partielle des muscles masticateurs par la toxine botulique. Cette toxine est injectée par voie transcutanée au niveau des muscles masticateurs.

Le plus souvent les muscles injectés sont : les temporaux et les masseters. Ces injections en fonction de la dose administrée permettent de diminuer nettement la force de ces muscles. Cela ne supprime pas les contractions musculaires mais en diminue notablement l’intensité ce qui diminue les conséquences du bruxisme. L’injection est réalisée en ambulatoire. Une fois injectée, la toxine va diffuser dans le muscle et son effet va être ressenti dans un délai de 2 à 15 jours pour persister en moyenne 4 à 8 mois.

Ce traitement n’a pas l’AMM (autorisation de mise sur le marché) en France dans cette indication mais de nombreuses publications scientifiques nationales et internationales confirment son efficacité. Le traitement a une efficacité moyenne de 4 à 6 mois puisque l’action de la toxine botulique est complètement réversible à l’issue de cette période. Les injections peuvent être renouvelées lorsque les symptômes réapparaissent de façon gênante. La plupart du temps les patients nécessitent 2 séances d’injections par an et ce tant qu’ils en éprouvent le besoin.

Un suivi post injection en consultation est indispensable, il permet de s’assurer de la bonne efficacité du traitement et de la bonne évolution des suites.

Les risques

Tout acte médical, même bien conduit, recèle un risque de complications. Il ne faut pas hésiter à prendre contact avec l’équipe chirurgicale qui vous a pris en charge, ou les urgences de la clinique ou contactez le 15 en cas d’urgence grave.

– Dans les suites des injections il peut être difficile de mâcher des aliments durs. Ce n’est pas grave et complètement réversible en quelque mois. Cela prouve que la toxine botulique fonctionne. A contrario il se peut que la dose injectée soit insuffisante et donc ne soulage que partiellement les symptômes gênants. Il sera donc nécessaire d’augmenter celle-ci lors de la prochaine séance d’injections.

– Comme les muscles masticateurs se contractent moins sous l’effet de la toxine botulique, leur volume peut diminuer. Cela peut modifier l’ovale du visage en l’affinant au niveau des angles de la mâchoire et en diminuant le volume des muscles des tempes.

– Puisque la toxine est administrée par injection intra-musculaire sa diffusion peut s’étendre à d’autres muscles que ceux ciblés. Par conséquent la toxine peut agir sur d’autres muscles de la face et notamment ceux du sourire. Fort heureusement cet effet est rare et transitoire et il régresse intégralement en quelques mois.

– Comme pour chaque médicament il existe un risque allergique. Celui-ci peut parfois nécessiter une surveillance après les injections.

– Il ne doit pas être pratiqué d’injection rap-prochées de moins de 3 mois sous réserve de risquer un effet vaccin conduisant à la production par le patient d’anticorps dirigés contre la toxine botulique rendant celle-ci inefficace pour les injections suivantes.

– La toxine botulique est injectée au sein même des muscles. Comme ceux-ci sont richement vascularisés il est possible qu’un hématome s’y développe. Cette complication normalement très rare est plus fréquente chez les patients ayant des troubles de la coagulation sanguine. La plupart du temps ces hématomes régressent spontanément sans séquelles.

Au total, il ne faut pas surévaluer les risques, mais simplement prendre conscience qu’un acte médical, même apparemment simple, comporte toujours une petite part d’aléas.